Handivoice a eu la chance de partir à la rencontre de Sandrine MARTINET, judoka au palmarès impressionnant, qui a rejoint le PSG l’été dernier.
“J’ai 41 ans, je suis mariée, j’ai 2 enfants, je suis masseur-kinésithérapeuthe”, se présente humblement Sandrine. Ce n’est qu’un peu plus tard que Sandrine laissera entrevoir son palmarès exceptionnel et abordera la question du handicap.
A 9 ans, j’allais voir les matchs du PSG avec mon père
“Le PSG, je suis presque tombé dedans quand j’étais petite. J’allais au Parc avec mon père quand j’étais enfant et j’étais fan de foot. Mais je cherchais à pratiquer un sport plus compatible avec mon handicap visuel, où la notion de respect était importante. A l’époque, je n’avais jamais entendu parler de cécifoot (foot adapté aux personnes malvoyantes) et le foot féminin était loin d’être aussi populaire qu’aujourd’hui. Mes frères faisaient du judo, ça avait l’air de leur plaire, alors j’ai essayé.
J’ai appris à vivre avec mon handicap, au milieu des autres
Née avec mon handicap visuel, mes parents craignaient que le déclarer m’empêche de m’intégrer dans la société et de trouver un travail… Alors j’ai fait toute ma scolarité sans aucun aménagement, en me débrouillant et en bénéficiant de la bienveillance de certains enseignants, qui me permettaient d’agrandir les photocopies, notamment. Les moqueries fusaient et j’avais peu d’amis à l’école, mais j’ai réussi à avoir un Bac S. Mes parents avaient confiance en moi, j’ai appris à me débrouiller, à prendre des coups, à me relever et à être autonome. Mon rêve, c’était de trouver quelqu’un qui m’aime, d’avoir des enfants et un métier.
Côté judo, le sport me plaisait bien. A partir du moment où je peux toucher la ceinture de mon adversaire, je n’ai besoin d’aucun aménagement. J’ai très vite progressé jusqu’à participer aux championnats de France “classiques”. Je me suis bien intégrée, j’aimais toutes les facettes du judo et d’ailleurs, j’apprends toujours, même après avoir été triple médaillée aux jeux paralympiques !
Après le Bac, je voulais être prof de sport, mais on me l’a déconseillé au regard de mon handicap visuel. Je me suis inscrite en fac de biologie et là, ça a été très difficile. Tout était trop grand pour moi ! Je me perdais dans les locaux, le tableau était beaucoup trop loin dans l’amphi pour que je vois les cours, les profs ignoraient mes besoins et ne respectaient pas les contrastes qui m’auraient permis de cerner ce qu’ils écrivaient… J’ai pris une grande claque. Je redouble, ce qui me donne le temps de me consacrer au judo… et ma vie bascule.
La reconnaissance administrative de mon handicap a changé ma vie.
J’avais du temps, je participe à des compétitions de parajudo et gagne le championnat de France toutes catégories, ce qui me qualifie pour les championnats du monde de Rome. J’avais alors 20 ans et je rencontre un autre judoka malvoyant à la suite d’un accident. Il m’explique qu’il suit des études de kiné, adaptées aux personnes malvoyantes. La perspective me plaît. J’avais bien pensé à ce métier, mais en raison de mon handicap, je ne pensais jamais pouvoir suivre les études qui y mènent ! Je m’inscris à Villejuif dans l’un des 4 établissements adaptés aux personnes malvoyantes en France dont j’ignorais jusqu’alors l’existence. Mais il fallait évidemment que mon handicap soit officiellement reconnu. Je fais donc les démarches administratives et c’est là que ma vie bascule ! J’intègre l’équipe de France et, la même année, je rencontre celui qui deviendra mon mari et le père de mes 2 enfants !
Cette reconnaissance administrative m’a permis de découvrir le monde du handicap, d’apprendre un métier que j’aime, dans un environnement adapté, pour la première fois à mes besoins ! Moi, la petite fille timide, je n’aurais jamais imaginé qu’un jour, je donnerais des conférences sur le handicap ! J’ai continué le parajudo et construit mon palmarès avant de rejoindre le PSG et réaliser un autre rêve d’enfant : fouler la pelouse du Parc des Princes et donner le coup d’envoi d’un match ! Et cette fois, c’est moi qui ai emmené mon père !
Si j’ai 2 messages à passer, c’est d’abord, qu’il ne faut pas surprotéger un enfant handicapé. Il va prendre des coups, mais il va aussi beaucoup apprendre et, ainsi, trouver sa voie. L’autre, c’est que la Reconnaissance de Qualité de Travailleur Handicapé vous ouvre des droits à un accompagnement, à des aménagements, qui vous permettront de donner le meilleur de vous-même.
Le sport ouvre un formidable univers des possibles. Handicapé ou non, il faut croire en ses rêves… et tout faire pour qu’ils se réalisent. C’est une formidable école de la vie. Il permet de se dépasser, d’apprendre à travailler en équipe… Des valeurs qui s’appliquent d’ailleurs très bien en entreprise.